La topographie et la cartographie basées sur les solutions GPS, le scanner 3D, l’utilisation de drones, les machines autonomes, s’invitent dans la construction des infrastructures. C’est la somme de toutes les peurs.
Des obstacles sont observés dans l’adoption de l’intelligence artificielle pour la construction des infrastructures publiques et privées. Cédric Féroldi, directeur général de BIA – Côte d’Ivoire, en a identifiés 5, ce mercredi 5 novembre 2024, au cours d’un panel sur : « Infrastructures et intelligence artificielle en Afrique : rêve ou réalité », au Salon des infrastructures d’Abidjan (SIA), au Parc des expositions, à Abidjan.
Manque de données fiables et coût d’implémentation de l’IA
D’abord, le manque de données fiables. C’est connu, l’IA se nourrit de données. Sauf qu’en Côte d’Ivoire, soit il n’y a pas données, soit elles sont peu fiables ou incorrectes. « Si on entraine une IA avec ce type de données, tout le système s’écroule », prévient Cédric Féroldi. Par conséquent, les entreprises ne prennent pas de risques pour ne pas entrer dans un cercle vicieux d’apprentissage erroné des algorithmes des IA. Il n’empêche que cette technologie est une réalité dans certaines entreprises.
Ensuite, le coût de l’implémentation. Le directeur général de BIA Côte d’Ivoire reconnait que l’IA a un coût relativement élevé. Par exemple un capteur coûte des centaines de milliers voire des millions de francs. Dès lors, sur les projets, le gouvernement fait le choix de construire plus de ponts et chaussées plutôt d’équiper en IA ceux existants. Pourtant, est-il convaincu, grâce à l’IA, la fluidité recherchée sur le réseau routier avec la construction de ces ouvrages, peut être obtenue. La question est : l’IA coûte-t-elle plus cher qu’un nouveau pont ? La réponse est un choix qui relève de la volonté politique de l’Etat.
Compétences locale et connectivité
Il y a aussi le manque de compétences locales, identifié comme défi dans l’adoption de l’IA en Côte d’Ivoire. « On croit que l’IA fait tout, tout seul. Ce n’est pas vrai. Un gros travail en amont est fait pour avoir une base de données correcte. Il faut, par conséquent, des gens qui trient, rangent, classifient. Toute chose qui demande de la compétence comme il en demande sur les chantiers pour l’installation des capteurs, la collecte et l’analyse des données. « Ces compétences ne sont pas encore suffisamment disponibles sur le marché », déplore le directeur général de BIA.
La limitation de la connectivité n’en est pas moins un autre défi. Selon Cédric Féroldi, la maintenance prédictive et la surveillance des machines se font avec des connexions 5G, 4G, 3G. Pour lui, même si la ville d’Abidjan est suffisamment pourvue en connectivité, les autres villes du pays le sont moins. « Donc, c’est un gros point qu’il va falloir améliorer si on veut vraiment intégrer l’intelligence artificielle dans la construction des infrastructures », recommande-t-il aux autorités chargées des télécoms.
Réglementation et crainte de la perte des emplois
Enfin, la réglementation et l’acculturation. Le directeur général de BIA regrette que les règlementations ne soient pas au même niveau dans tous les pays. Ce qui constitue un frein à la mise en place de nouveaux outils dotés d’IA. Surtout qu’un déficit d’informations et un manque de connaissance a pour effet de provoquer chez des dirigeants certaines restrictions. « Plusieurs entreprises rechignent à investir dans les technologies IA. On parle de sécurisation des données. Elles ont peur de ne pas maitriser les fuites de données ou d’informations confidentielles », dit-il.
Il reste la crainte de la perte des emplois suscitée par les machines autonomes. Une crainte justifiée. « Par exemple, pour faire des relevés topographiques sur le terrain, nos équipements permettent de faire le travail de 5, 10, 20 personnes », confirme M. Féroldi. Sauf que pour lui, ce n’est pas une suppression d’emplois, mais une évolution des emplois. Dès lors, il suggère que les ressources humaines s’adaptent aux évolutions. « On revient au manque de compétences locales. Il faudrait, peut-être, un changement d’objectifs dans la formation de nos jeunes », conclut-il.
K.Bruno