Les influenceurs web font des millions de vues, mais ne perçoivent pas un seul centime des plateformes des médias sociaux Facebook, Instagram et TikTok… En Côte d’Ivoire, l’influence sur le web ne paie que quand les marques s’en mêlent, et pour beaucoup, vivre de ses contenus reste un parcours semé d’obstacles.
Le débat a éclaté après un échange devenu viral entre deux poids lourds de TikTok : le Nigérian Peller, en visite à Abidjan, et l’Ivoirien Rash Makosso, suivis respectivement par 12,6 millions et 3,8 millions d’abonnés. Lors d’un live, Peller s’étonne que son homologue ivoirien ne touche aucun revenu direct de ses contenus malgré ses abonnés, alors que lui engrange des sommes à six chiffres grâce à TikTok dans son pays.
Les partenariats comme substitut à la monétisation
Ce moment viral a ravivé un débat : en Côte d’Ivoire, les créateurs de contenus ne gagnent rien des plateformes réseaux sociaux. Pourtant, certains arrivent à vivre de leur contenu. Pas grâce aux vues, mais grâce aux marques. Partenariats, placements de produits, contrats d’égérie, etc. Ce modèle publicitaire permet à quelques figures bien en vue de transformer leur notoriété en revenus. Mais cette économie de l’influence repose sur la visibilité, la popularité et la capacité à séduire les annonceurs. Et pour la majorité des créateurs ivoiriens, ce système reste fragile, inégal et difficile d’accès. Ce modèle, bien qu’efficace pour quelques figures, ne règle pas le problème de fond : la monétisation directe.
TikTok, Instagram, Facebook… autant de plateformes où les créateurs ivoiriens cumulent des millions de vues, sans toucher un seul centime en retour. Contrairement à leurs homologues du Nigeria ou du Ghana, ils n’ont pas accès aux programmes de monétisation directe. Pas de Creator Fund, pas de live gifting, pas de rémunération automatique. Et pourtant, l’influence ivoirienne ne cesse de grandir.
Influence lifestyle : quand l’image devient business
Face à cette impasse, les créateurs ont trouvé une autre voie : les partenariats commerciaux. Maa Bio, Saasha.sam, I’souch figures de proue de l’influence en Côte d’Ivoire affirment pouvoir vivre de leur activité grâce aux collaborations avec des marques. Leur visibilité attire les annonceurs, qu’ils soient locaux ou internationaux, et leur contenu devient un levier publicitaire puissant. Le principe est simple : plus tu es vu, plus tu vends. Les marques cherchent à capter l’attention d’un public jeune, connecté. Les influenceurs deviennent les vitrines de leurs produits.
Campagnes sponsorisées, placements de produits, contrats d’égérie… tout se joue sur l’audience et l’engagement. Sur le segment lifestyle, certains noms s’imposent comme références. Saraï D’Hologne, épouse du rappeur Didi B, incarne une influence élégante et inspirante. Carmen Sama, elle, est omniprésente : égérie de la plateforme de paris en ligne 1xBet, son visage s’affiche sur les panneaux publicitaires dans toute la ville. Zagba le Requin, avec son style décalé et ses punchlines virales, séduit les marques et les internautes. Ces profils montrent que l’influenceur web peut devenir un métier à condition d’être visible, banquable et stratégiquement positionné.
Un modèle économique basé sur les marques, pas sur les plateformes
Mais ce modèle a ses limites. Il repose sur la notoriété, la constance et la capacité à séduire les marques. Les créateurs émergents, moins exposés, peinent à décrocher des contrats. Sans monétisation intégrée aux plateformes, il n’existe pas de filet économique pour ceux qui n’ont pas encore percé. La popularité ne suffit pas. Il faut savoir se vendre, négocier, et parfois adapter son contenu aux attentes des annonceurs. Une réalité qui creuse l’écart entre les têtes d’affiche et les talents en devenir.
Le débat lancé par Peller et Rash Makosso a mis en lumière une vérité : en Côte d’Ivoire, l’économie de l’influence repose sur les marques, pas sur les plateformes. Tant que TikTok, Instagram ou encore Facebook ne reconnaîtront pas officiellement les créateurs ivoiriens, ces derniers continueront de produire sans rémunération directe. Mais en attendant, les partenariats restent le nerf de la guerre. Et les influenceurs, les nouveaux visages de la publicité à Abidjan.
Ornella Izaï





































