Dans le cadre de l’afterwork organisé par Danaya dans les locaux de l’incubateur Mstudio à Cocody, Gilles Gnanagbe, CEO de Wizall Côte d’Ivoire, nous a accordé une interview. Avec une expertise acquise dans plus de 15 pays à travers l’Afrique dans le domaine du mobile money et de la banque, il expose sa vision sur la difficile conciliation entre exigences réglementaires et l’accessibilité des services financiers, dans la fintech.
Il aborde aussi l’impact des nouvelles technologies telles que la solution de Danaya sur la réduction des coûts et l’accélération des processus d’identification, de même que les enjeux sécuritaires et réglementaires qui en découlent.
Est-il possible de réconcilier conformité et accessibilité ?
Je dirais que c’est possible, mais, d’un côté, l’accessibilité impliquerait par exemple que nos clients puissent ouvrir leur wallet en deux minutes avec des vérifications en temps réel. De l’autre, la conformité impose un dispositif sécuritaire très strict, indispensable dans une zone géographique exposée aux risques de terrorisme et de blanchiment d’argent. La Côte d’Ivoire, qui se trouve dans la zone grise du GAFI, illustre bien la nécessité de renforcer ce dispositif afin de rester sur la bonne trajectoire. Et donc justement, le fait de vouloir augmenter l’accessibilité pourrait baisser, en fait, le dispositif de sécurité.
Face à ce dilemme, comment la solution de Danaya intervient-elle ?
La solution de Danaya (une plateforme SAAS qui accompagne les institutions financières dans leur conformité et la vérification d’identité de leurs clients, NDLR) permet de concilier ces impératifs avec une solution juste pour fendre la poire en deux. D’une part, elle offre des outils performants pour vérifier la qualité des informations et s’assurer de l’identité des personnes qui adhèrent à nos services. D’autre part, elle permet d’accélérer les processus d’identification à toute heure de la journée. Imaginez un client à l’aéroport à 23 heures qui souhaite utiliser votre produit ; avec Danaya, nous pouvons l’identifier et valider l’ouverture de son wallet immédiatement, sans attendre l’ouverture des bureaux le lendemain.
Quels risques identifiez-vous dans la numérisation des processus KYC et KYB ?
Le principal risque réside dans l’utilisation de l’intelligence artificielle pour fabriquer des faux documents, qui peuvent compromettre le processus de KYC. La rapidité offerte par la digitalisation peut alors devenir un vecteur de fraude si l’on ne renforce pas les mécanismes de contrôle, ce qui pourrait augmenter nos coûts et compliquer la vérification de l’identité.
Quelles méthodes de cybersécurité privilégiez-vous pour la protection des données sensibles ?
Nous nous appuyons sur plusieurs normes et dispositifs reconnus, tels que la norme ISO 27000, qui propose des mécanismes de sécurisation, ainsi que sur des standards comme PCI-DSS pour la protection de nos infrastructures. De plus, l’ARTCI impose des dispositions spécifiques pour la sécurisation des données d’identité. Ces outils, complétés par des dispositifs traditionnels comme les pare-feu et le chiffrement, constituent un ensemble robuste pour protéger nos systèmes et les données sensibles que nous collectons.
La réglementation actuelle pourrait-elle freiner l’inclusion financière et limiter le taux de bancarisation ?
La réglementation n’est pas intrinsèquement un frein, mais elle peut le devenir si elle n’est pas accompagnée de démarches administratives adaptées. Des exemples comme le système d’identification unique au Nigeria ou la solution biométrique en Inde montrent qu’une forte volonté gouvernementale peut transformer une contrainte en levier pour l’inclusion financière. Tout dépend du dispositif administratif en place dans chaque pays de la sous-région.
Comment améliorer le contrôle et l’authentification via des plateformes comme Danaya ?
Pour renforcer la vérification, il faut disposer d’infrastructures partagées par l’ensemble des acteurs du secteur financier. Par exemple, le projet du GIM-UEMOA qui permet à tous les détenteurs de cartes de débit d’effectuer des retraits sur n’importe quel guichet interbancaire est une belle illustration de ce que peut offrir la mutualisation des données. Une infrastructure similaire, dédiée aux chèques ou à la vérification des signatures, serait également très bénéfique pour sécuriser nos échanges financiers.
Entretien réalisé par James Kadié