Il y a quelques semaines, l’actualité technologique mondiale s’est vue touchée par une nouvelle autant inédite qu’insolite. Vous l’avez sûrement vu ou lu quelque part, la société chinoise de jeux vidéo NetDragon Websoft créée en 1999 et qui pèse près de 10 milliards de dollars, vient de « recruter » … ou alors devrions nous dire « créer » son nouveau CEO.
En effet, « Madame TANG YU », nouvelle PDG de l’entreprise chinoise, s’avère être une Intelligence Artificielle (IA). C’est une véritable révolution dans le monde professionnel moderne. Assisterions-nous au début de la montée en puissance des machines dans le monde professionnel au détriment des êtres humains ? Tout un chacun pourrait se faire sa propre idée.
Parmi toutes les questions que peut soulever la nomination d’une machine à la tête d’une entreprise à notre époque, l’une des plus épineuses, est certainement celle de la protection des données personnelles.
L’IA peut se définir en des termes très simples comme étant la possibilité pour une machine d’imiter l’intelligence humaine. Qui parle d’imitation de l’être humain, parle nécessairement de traitement de données à caractère personnel de ce dernier. La donnée personnelle est, quant à elle, toute information permettant d’identifier une personne physique.
Rappelons que de nombreux Etats dans le monde se sont dotés de législations pour protéger les données personnelles de leurs concitoyens. Il s’agit, par exemple, de la Personal Information Protection Law (PIPL) en Chine, entrée en vigueur en 2021. En Côte d’Ivoire, il s’agit de la loi N°2013-450 du 19 juin 2013 relative à la protection des données personnelles.
Entre l’IA et la protection des données personnelles
Le point d’achoppement entre l’IA et la protection des données personnelles est que le premier nécessite un traitement massif et à grande échelle de données personnelles, tandis que le second impose une certaine limitation des traitements de données.
En d’autres termes, l’IA a besoin de se nourrir de données personnelles des hommes pour être à même d’agir comme eux. Dans le cas spécifique de « Madame TANG YU », la machine PDG est certainement créée pour superviser et administrer le travail des êtres humains. C’est donc à juste titre, que nous pourrions nous interroger sur le mode de création de cette IA vis-à-vis des données personnelles, notamment celles des employés de la société.
Madame TANG YU respecte-t-elle la protection des données à caractère personnel ?
Les données personnelles des employés de l’entreprise ont-elles été utilisées pour que Madame TANG YU ait la faculté de connaître leurs vies privées, activités et habitudes ?
Les employés ont-ils été préalablement informés, ou alors, ont-ils donné leur consentement pour ce traitement ?
Les responsables de la société chinoise ont-ils mis en place toutes les mesures nécessaires pour tenir compte de la protection de la vie privée de leurs salariés ?
L’évolution de la technologie et les besoins de plus en plus exigeants de l’humanité vont inéluctablement conduire à plusieurs « Madame TANG YU » dans les années avenir. Il est donc nécessaire que les responsables de traitement, créateurs d’IA, adoptent les bonnes pratiques tenant compte du respect et de la sécurité des données personnelles des personnes concernées. Il faut trouver le juste milieu pour un mariage entre IA et protection des données personnelles.
Lionel KOKORA